Réintroduction du dahu dans les Alpes en 2022 :
Toujours pas de consensus…
La décision est passé inaperçue. Pourtant, à la fin de l’année 2019, le Comité pour l’Organisation de la Valorisation et de l’Inventaire des Dahus* a décidé de réintroduire un couple de dahu dans un massif des Alpes. Cette décision était inévitable. Face à la recrudescence des chasses aux dahus et à l’appétence des « monchus » pour des clichés instagramables, l’animal s’avère constamment dérangé dans son biotope. L’animal serait en danger de voie de disparition.
La guerre en Ukraine a retardé le lancement des rencontres internationales pour évoquer ce sujet. Malgré tout, des représentants des Pays de Savoie, du Valais et de la Vallée d’Aoste se sont réunis autour d’une fondue au siège du Comité à Genève au début du mois de mars 2022, afin de décider dans quel massif alpin serait réintroduite l’espèce.
La réunion a coupé court !
Les savoyards s’y sont formellement opposés, prétextant un risque de frein au développement de nouvelles installations de retenues collinaires nécessaires à la production de neige de culture. D’autant que les autorisations administratives devraient arriver à terme au bout de vingt ans de procédure d’enquête publique, et au risque de multiples recours administratifs. Pourtant, les acteurs du pastoralisme étaient favorables à cette réintroduction du dahu dans les alpages savoyards. Face à la vulnérabilité des troupeaux à la prédation du loup, la multiplication des dahus serait une solution pour la protection des troupeaux. Les dahus étant des proies faciles pour le loup, cette mesure permettrait d’atténuer les attaques de troupeaux.
Les valaisans ont tout de suite perçu l’atout touristique, notamment pour développer un tourisme quatre saisons pour contrer les aléas du manque de neige. Les institutions touristiques ont d’emblée proposé le site du Cervin pour l’implantation du dahu. Le projet prévoit l’installation d’un téléphérique, avec une cabine tournante au sommet mythique du Cervin. Grâce à un système GPS développé par l’industrie horlogère helvétique, des milliers de touristes pourraient voir évoluer l’animal dans son milieu naturel. Trois principales banques suisses et une prestigieuse fondation ont fait part de leur soutien pour financer cet équipement. Mais ce choix du site du Cervin a ranimé les éternelles polémiques entre le Bas-Valais et le Haut-Valais, entre francophones et germanophones. Et comme la décision doit être validée par un référendum, les autorités cantonales ont mis ce projet en sommeil pour l’instant, afin d’éviter les risques de scission du canton.
Quant aux valdotains, ils ont naturellement proposé le site du Parc du Grand Paradis pour réimplanter le dahu pour combler la solitude des bouquetins. Cependant, comme à l’accoutumée, les autorités valdotaines veulent avoir l’assurance, au préalable à toute décision, d’un financement européen pour réaliser cette opération.
Les tyroliens n’ont pas pris part à cette rencontre. Le sujet de réintroduction du dahu leur parait contraire à leurs valeurs traditionnelles. Afin de préserver la tranquillité du dahu, la pratique du yodel en montagne deviendrait inévitablement très règlementée ; ce qui est en effet incompatible avec les us et coutumes du Tyrol.
La réintroduction du dahu n’est donc pas envisageable pour le moment, au grand dam des scientifiques. Face à cette impasse, et dans un but pédagogique, il a été proposé dans un premier temps d’autoriser des captures de dahu au cours de l’été 2022, dans le but de l’apprivoiser comme animal domestique, et d’animer les veillées d’hiver des colonies de vacances.
*Comité pour l’Organisation de la Valorisation et de l’Inventaire des Dahus ( Sigle COVID )
Source : Le poisson des Alpes ( 01 – 04 – 2022 )